Mesurer ce qui compte : L’équité incite à la préparation et à la résilience de la santé publique

Publication Summary

En collaboration avec le Centre de dollaboration nationale des déterminants de la santé.

Les deux objectifs du présent document d’orientation sont les suivants :

  1. Aux étapes de la préparation et de l’intervention dans le cycle de gestion de la pandémie, encourager la prise de décision et de mesures qui tiennent compte explicitement des déterminants structurels et sociaux de la santé et qui visent à atténuer les iniquités de santé.
  2. Enrichir les indicateurs de résilience du système de santé publique de manière à mesurer l’efficacité des mesures prises pour atténuer les iniquités et soutenir et accroître les approches équitables à l’heure actuelle et lors de futures épidémies et pandémies.

Introduction

La préparation, l’intervention, l’atténuation et le rétablissement font partie des fonctions de base de la santé publique du Canada en cas de pandémie. Chapeautée par les agences, les services et les bureaux de santé publique du Canada, la gestion de la lutte contre le SRAS-CoV2 (COVID-19) au Canada ont donné lieu à une mobilisation sans précédent de fonds, de ressources humaines et de matériel, impliquant les collectivités et les ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux d’un bout à l’autre du pays.

La COVID-19 a fait ressortir et a amplifié les iniquités perpétuellement vécues au Canada, y compris celles associées aux systèmes de santé. L’accès inégal aux soins de santé, le racisme et la marginalisation en termes de possibilités d’emploi et de services essentiels, et l’incapacité à déterminer les iniquités à partir des données ont retenu l’attention du public. Pour rendre l’équité en santé explicite et inciter les acteurs de la santé publique à porter une attention éclairée aux problèmes d’équité, il faudrait situer les fonctions de préparation et d’intervention en réponse à la pandémie actuelle dans le contexte de systèmes plus larges. Les systèmes de santé publique peuvent contribuer à atténuer les iniquités de santé et à renforcer la résilience des populations. Une plus grande résilience peut influencer le cours de la pandémie au Canada. Pour comprendre les iniquités et la défavorisation qui s’ensuit, il importe au plus haut point de mesurer ce qui compte et d’examiner ce qui est mesuré et ce qui est omis du processus.

Au début de 2020, lorsque la propagation et les effets de la COVID-19 s’accéléraient au Canada, les équipes des Centres de collaboration nationale des maladies infectieuses (CCNMI) et des déterminants de la santé (CCNDS) se sont penchées sur les leçons tirées et les recommandations entourant l’équité en santé à la suite de pandémies précédentes, en l’occurrence le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et le virus de la grippe A [anciennement connue sous le nom A(H1N1)pdm09]). Le pays se préparait à affronter une deuxième vague et des vagues subséquentes de l’épidémie tout en continuant de lutter contre la transmission et l’infection. Les organismes de santé publique se sont retrouvés dans un cycle de planification, d’intervention et de rétablissement. Ce document a été rédigé à l’origine pour aider les organismes de santé publique à réduire les iniquités et à prévenir des conséquences encore plus graves ou non intentionnelles des mesures prises en santé publique.

En 2025, les considérations d’équité en santé dans la préparation à une pandémie sont aussi importantes qu’elles l’étaient dans les premières années de la pandémie de COVID-19. Les discussions sur l’équité en santé, la résilience et l’utilisation des indicateurs dans ce document ont toutes été mises à jour en fonction de conversations avec le personnel de santé publique au cours des quatre dernières années.

Les deux objectifs du présent document d’orientation sont les suivants :

  1. Aux étapes de la préparation et de l’intervention dans le cycle de gestion de la pandémie, encourager la prise de décision et de mesures qui tiennent compte explicitement des déterminants structurels et sociaux de la santé et qui visent à atténuer les iniquités de santé.
  2. Enrichir les indicateurs de résilience du système de santé publique de manière à mesurer l’efficacité des mesures prises pour atténuer les iniquités et soutenir et accroître les approches équitables à l’heure actuelle et lors de futures épidémies et pandémies.

Contexte

Lors de l’épidémie de SRAS de 2003, on s’est aperçu que le système de santé publique canadien présentait des lacunes. Il était en effet mal organisé, doté de ressources insuffisantes et mal préparé. Bon nombre de rapports et d’études parus par la suite traitent de ces faiblesses. On a donc subséquemment apporté des changements aux systèmes de santé publique d’un bout à l’autre du Canada. Parmi les changements apportés, outre la création de l’Agence de la santé publique du Canada et du bureau de l’administrateur en chef de la santé publique du Canada, soulignons celles concernant les structures fédérales, provinciales et territoriales centrées sur la surveillance, la planification, la recherche, le transfert des connaissances de même que les systèmes stratégiques et de prise de décision.

Moins d’une décennie plus tard, la pandémie de grippe A (H1N1) est venue de nouveau mettre à l’épreuve la capacité et l’état de préparation de la santé publique. Les conclusions des analyses et de l’évaluation menées subséquemment s’apparentent à celles tirées de la crise du SRAS. Les nouvelles recommandations formulées à la suite des deux pandémies concernent l’importance de porter plus d’attention aux populations à risque ainsi qu’à l’influence et à l’incidence des pandémies sur les déterminants sociaux de la santé, ce qui correspond à l’approche du gouvernement du Canada en matière de santé des populations. Cependant, les recommandations ne traitent pas explicitement de l’importance des approches et des analyses qui intègrent une démarche pour promouvoir l’équité en santé ni des concepts connexes.

Plus de 20 ans après la crise du SRAS, les valeurs et les priorités énoncées par le Canada en ce qui a trait à se préparer à reconnaître et à répondre aux besoins des populations « vulnérables » ou « prioritaires » sont sans doute mieux articulées. Certains rapports et exposés de principe évoquent explicitement la nécessité de mettre un terme à la colonisation et à la marginalisation des Premières Nations, des Métis et des Inuits et au racisme systémique qui entraînent les inégalités de santé. On y exhorte en outre les parties prenantes à améliorer les analyses fondées sur le sexe et le genre et à en considérer les recoupements avec d’autres déterminants de la santé. D’autres défis liés à la satisfaction des besoins des collectivités rurales et éloignées, où le personnel de santé se fait rare et où l’accès aux soins et aux services de santé demeure problématique, ont également été soulignés de manière plus explicite. On constate cependant un désir général d’officialiser les processus et les mesures destinées à prévenir et à atténuer les iniquités afin d’améliorer la probabilité d’obtenir des résultats plus équitables en matière de santé au Canada. La COVID-19 a touché de façon disproportionnée les populations racisées, à faible revenu et nouvellement arrivées au pays, et principalement les femmes de ces groupes. Au début de la pandémie, par exemple, le Wellesley Institute a mentionné que les personnes s’identifiant comme étant d’origine arabe, moyen-orientale, latino-américaine ou du Sud-Est asiatique ou comme étant Noires présentent un risque de six à neuf fois plus élevé d’obtenir un résultat positif à un test de dépistage de la COVID-19 que les populations blanches selon les données recueillies par Santé publique Toronto durant la période s’échelonnant de la mi-mai à juillet [2020]. D’autres auteurs ont signalé des taux de morbidité inégaux qui se sont poursuivis au cours des années pandémiques. Bien que l’on reconnaît de plus en plus ce problème d’iniquités, il faut aussi se doter de moyens concrets pour passer à l’action et pour corriger la situation.

Phases du projet

Le présent document d’orientation fait la synthèse des phases d’un projet mené par le Centre de collaboration nationale des maladies infectieuses (CCNI) et le Centre de collaboration nationale des déterminants de la santé (CCNDS) en 2020, et comprend des mises à jour pour 2025. Notre objectif est d’encourager les professionnels et les décisionnaires de la santé publique à considérer de manière explicite l’équité en santé aux étapes de préparation, d’intervention et de rétablissement dans la lutte contre une pandémie. Pour la première phase, nous avons retenu les services d’une experte-conseil et l’avons chargée de passer en revue les principaux rapports d’analyse de l’état de préparation et des interventions lors de la crise du SRAS en 2003 et de l’épidémie de grippe A(H1N1) en 2009-2010. Nous voulions connaître la mesure dans laquelle les rapports faisaient implicitement ou explicitement état de l’équité en santé. Pour la deuxième phase, nous avons puisé dans les derniers travaux de la Dre Yasmin Khan et de ses collègues qui ont élaboré un cadre conceptuel et des indicateurs afin de mesurer le rendement des organismes de santé publique par rapport à leur préparation aux situations d’urgence. Nous voulons étendre leurs travaux aux étapes des interventions et du rétablissement (voir la figure 1), puisque les systèmes de santé publique gèrent des cycles itératifs de prévention, de préparation, d’intervention et de rétablissement. La Dre Khan et ses collègues s’intéressaient à la résilience des systèmes de santé publique. Pour notre part, nous voulons aussi examiner les indicateurs de performance des systèmes en ce qui a trait à la prise en compte de la résilience des populations lorsque l’on a cherché à réagir ou à mettre un terme aux iniquités de santé. La troisième phase consistait en des conversations et des ateliers avec des professionnels et des décisionnaires de la santé publique au sujet de l’utilité de tels indicateurs et des formats d’orientation qui pourraient le mieux servir les organismes et les agences de santé publique[33]. En 2024, nous avons revu et mis à jour le présent document. Le présent document porte principalement sur la capacité des organismes de santé publique d’intégrer les perspectives d’équité en santé de manière systématique et systémique dans les prises de décision entourant la préparation, l’intervention et le rétablissement en situation d’urgence.

Structure du document

Ce document comporte quatre parties. Dans la première partie, nous faisons le tour des principaux documents et des principales mesures se rapportant à l’atténuation des iniquités de santé au Canada. Nous y soulignons l’importance d’intégrer les valeurs et les principes d’équité dans les processus de préparation et dans les plans de gestion en cas d’urgence de santé publique.

Dans la deuxième partie, nous résumons les constations de la revue documentaire effectuée sur le traitement fait de l’équité en santé et des iniquités de santé dans les documents parus à la suite de la crise du SRAS et de la grippe A(H1N1) et portant sur les processus de planification et d’intervention lors de ces pandémies. Nous y mentionnons en outre les mesures à prendre à court et à long terme pour continuer de communiquer les iniquités et la défavorisation durant les éclosions actuelles et celles susceptibles de survenir à l’avenir.

Nous décrivons dans la troisième partie un processus de prise de décision que les organismes de santé publique et autres organismes concernés pourraient adapter. Nous y analysons plus en détail les travaux de la Dre Yasmin Khan et de ses collègues, qui ont élaboré un cadre de préparation aux situations d’urgence en santé publique afin de favoriser la résilience du système de santé publique.

La quatrième partie contient une série d’indicateurs créés par la Dre Khan et de ses collègues à la lumière d’un processus de recherche rigoureux, ainsi qu’une série de précisions liées à l’équité en santé qui ont récemment été mises à jour. Ces précisions comprennent maintenant des orientations détaillées liées aux mesures et des méta-précisions de niveau supérieur conçues pour s’assurer que les considérations en matière d’équité sont intégrées à chaque étape de la planification et de la prise de décision en santé publique. Les indicateurs visent à encourager les organismes de santé publique à prendre des mesures explicites dans la planification et les approches visant à intégrer et à faire participer les populations les plus défavorisées durant une pandémie au Canada. Les indicateurs et nos précisions montrent la nécessité de collecter des données sur l’état de santé des populations et les résultats en matière de santé et d’en faire rapport en les désagrégeant en fonction de facteurs comme le sexe, l’âge, le lieu de résidence, le groupe ethnique et la race.

Remerciements

Ce document est une mise à jour du document de 2020 Mesurer ce qui compte au coeur de la pandémie de COVID-10 : Indicateurs d’équité pour la santé publique. En ce qui concerne le projet et le document originaux, les auteures tiennent à remercier Lesley Dyck pour sa contribution aux premières étapes du projet. Elles souhaitent également remercier Yoav Keynan, Yasmin Khan, Connie Clement, Samiya Abdi et Hannah Moffatt pour leurs commentaires avisés. Elles signalent en outre que le contenu du présent document se veut évolutif. Elles accueilleront donc avec plaisir les commentaires et les suggestions.

En 2025, elles tiennent à remercier tout les membres du personnel de santé publique avec qui elles ont discuté de ce projet au cours des quatre dernières années.

Références

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