Dengue

Données à partir de juillet 2024

Les Points saillants sur les maladies du CCNMI fournissent aux cliniciens et aux praticiens de la santé publique du Canada des données à jour sur les principales maladies infectieuses pour la pratique de la santé publique au pays. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un examen formel de la documentation, les informations sont recueillies auprès de sources clés, notamment l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et dans des documents évalués par les pairs.

Ce point saillant a été préparé et mis à jour par Signy Baragar. Les questions, commentaires et suggestions concernant ce point saillant sont les bienvenus et peuvent être envoyés à nccid@manitoba.ca.

Questions abordées dans les points saillants :

  1. Quelles sont les principales caractéristiques de la dengue ?
  2. Quel est le risque actuelles Canadiens decontracter la dengue pour ?
  3. Quelle est la prévalence de la dengue au Canada ?
  4. Quelles mesures devrait-on prendre en cas de suspicion de la dengue ou de contact avec la maladie ?

Quelles sont les principales caractéristiques de la dengue ?

Caractéristiques et causes

La dengue est une infection virale transmise par la piqûre de moustiques infectés par Aedes (Ae. aegypti ou Ae. albopictus). Il existe quatre sérotypes du virus de la dengue (DENV), qui sont : DENV-1, DENV-2, DENV-3 et DENV-4. Lorsqu’un moustique pique une personne infectée par l’un des sérotypes du DENV, il devient porteur du virus et peut alors le transmettre à d’autres personnes en les piquant.

Bien que la dengue sévisse le plus souvent dans des régions tropicales et subtropicales, les moustiques porteurs du virus peuvent s’adapter à de nouveaux environnements en raison des changements climatiques et des conséquences de l’épisode 2023 du phénomène climatique El Niño qui a entraîné une augmentation des températures, des précipitations et de l’humidité.

Symptômes

Environ une sur quatre personnes atteintes de la dengue développera la maladie. De manière générale, la plupart des personnes infectées ne présentent que des symptômes bénins, voire aucun symptôme et se rétablissent en une à deux semaines.

Les symptômes bénins de la dengue peuvent être confondus avec d’autres maladies qui provoquent des symptômes semblables à ceux de la grippe. Le symptôme le plus courant de la dengue est l’apparition soudaine d’une forte fièvre (40° C/104 °F) pendant trois à cinq jours. La fièvre s’accompagne généralement d’au moins deux des symptômes suivants :

Gravité et complications

Environ 1 sur 20 personnes atteintes de la dengue présentera des complications et développera une dengue sévère. La dengue sévère survient en cas de perméabilité vasculaire et de thrombocytopénie (diminution du nombre de plaquettes), ce qui peut entraîner une hémorragie interne, une défaillance des organes et un état de choc.

Les personnes infectées pour la deuxième fois courent un risque accru de dengue sévère.

La dengue sévère, également appelée dengue hémorragique, survient souvent 24 à 48 heures après la disparition de la forte fièvre. Les symptômes de la dengue sévère comprennent :

  • vomissements persistants ;
  • douleurs abdominales sévères ;
  • saignement des gencives ou du nez ;
  • sang dans l’urine, les selles ou les vomissures ;
  • respiration difficile ou rapide ;
  • sensation de fatigue, de faiblesse, d’agitation ou d’irritation ;
  • forte sensation de soif ;
  • peau pâle et froide.

La dengue sévère peut être fatale en quelques heures et nécessite une prise en charge médicale immédiate.

Transmission

La dengue se transmet de l’homme au moustique et du moustique à l’homme. Lorsqu’un moustique pique une personne infectée par le virus de la dengue, le virus se réplique et se propage dans les tissus et les glandes salivaires du moustique en question. Environ 8 à 12 jours après l’ingestion du virus, le moustique infecté peut alors le transmettre à d’autres personnes en les piquant. Le moustique infecté peut continuer à transmettre le virus jusqu’à sa mort.

Le moustique femelle Aedes aegypti (fièvre jaune) est le principal vecteur de transmission du virus de la dengue à l’homme. Aedes albopictus, connu sous le nom de « moustique tigre » ou « moustique des forêts »,est un vecteur secondaire de la dengue en Asie.

La dengue ne se transmet pas directement d’homme à homme, sauf dans de rares cas de transfusions sanguines ou de dons d’organes.

Prévention et contrôle

Le meilleur moyen de prévenir la dengue consiste à réduire le nombre de gîtes larvaires des moustiques. En réduisant le nombre de gîtes larvaires, peu de moustiques adultes pourront émerger pour transmettre le virus de la dengue.

Les moustiques Aedes aegypti pondent leurs œufs dans des récipients contenant de l’eau stagnante et préfèrent vivre dans des zones urbaines à proximité des habitations. Ces œufs éclosent au contact de l’eau.

Pour limiter le nombre de moustiques adultes qui émergent du stade œuf/larve/pupe, il convient de couvrir ou de disposer soigneusement des récipients d’eau stagnante. Les récipients contenant de l’eau stagnante doivent être vidés, nettoyés et frottés une fois par semaine pour éliminer les œufs de moustiques.

Les gîtes larvaires des moustiques Aedes aegypti à l’intérieur des habitations comprennent :

  • Bouteilles, récipients en plastique ;
  • Réservoirs de stockage d’eau (eau potable domestique, salle de bain, etc.) ;
  • Pots de fleurs ;
  • Pièges à fourmis.

Les gîtes larvaires à l’extérieur des habitations peuvent inclure :

  • Bouteilles, récipients et boîtes de conserve jetés ;
  • Fûts d’eau ;
  • Bateaux, équipements ;
  • Feuilles de plantes diverses ;
  • Creux dans les arbres, nids-de-poule et trous dans des sites de construction ;
  • Fruits d’arbres.

Protection individuelle et des ménages

Les moustiques Aedes aegypti se nourrissent du sang humain pendant la journée, surtout tôt le matin et le soir avant le crépuscule. Dans les zones à risque, il est important de :

  • porter des vêtements qui couvrent autant que possible votre corps ;
  • appliquer des répulsifs contre les moustiques (contenant du DEET, de l’icaridine ou de l’IR3535) ;
  • utiliser des moustiquaires idéalement imprégnées de répulsif si vous dormez pendant la journée (lorsque les moustiques Aedes aegypti sont plus actifs) ;
  • installer des écrans anti-insectes aux fenêtres et aux portes ;
  • utiliser des insecticides sous forme d’aérosols, des vaporisateurs ou des serpentins fumigènes.

Vaccins

Le tout premier vaccin contre la dengue (Dengvaxia®) a été homologué au Mexique en 2015 pour les personnes âgées de 9 à 45 ans. À ce jour, ce vaccin est autorisé dans 20 pays pour les personnes vivant dans des zones où la dengue est endémique. L’utilisation du vaccin contre la dengue n’est pas approuvée au Canada.

L’Organisation mondiale de la Santé a recommandé de limiter l’administration de Dengvaxia® aux personnes ayant déjà été infectées par la dengue.

Traitement

Il n’existe pas de traitement spécifique contre la dengue.

L’acétaminophène (paracétamol) est souvent utilisé dans le traitement symptomatique de la fièvre et des douleurs. Il est déconseillé de prendre de l’aspirine, de l’ibuprofène ou d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens, car ils peuvent augmenter le risque de saignement.

Les patients présentant des symptômes de dengue sévère doivent se rendre immédiatement à l’hôpital. La dengue sévère constitue une urgence sanitaire.

Epidémiologie

Survol régional
Généralités

Près de la moitié de la population mondiale vit dans des régions où il existe un risque de contracter la dengue. La dengue est plus fréquente dans les zones urbaines et semi-urbaines des régions tropicales et subtropicales. Elle est actuellement endémique dans 90 pays de cinq des six régions de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) : les Amériques, l’Afrique, la Méditerranée orientale, l’Asie du Sud-Est et le Pacifique occidental. La dengue n’est pas endémique dans la région européenne de l’OMS, mais elle s’est propagée à de nouvelles zones en Europe, ainsi qu’en Amérique du Sud et en Méditerranée orientale.

Au 28 juin 2024, le nombre annuel de cas de dengue a atteint un sommet historique, avec plus de 10 millions de cas en 2024 dans le monde, dont la majorité a été signalée par l’OPS dans la région des Amériques.

En raison de l’augmentation des températures et de l’évolution des régimes de précipitations dus aux chocs climatiques, la dengue pourrait devenir endémique dans le sud des États-Unis, en Europe méridionale et dans certaines régions de l’Afrique au cours des 10 prochaines années.

Région des Amériques

Situation actuelle (données au 15 juin 2024)

Entre le 1er janvier et le 15 juin 2024, la région des Amériques a signalé un total de 10 141 300 cas suspects de dengue, ce qui représente une augmentation de 232 % par rapport à la même période en 2023 et de 421 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années (Figure 1).

Figure 1. Nombre total de cas suspects de dengue dans la région des Amériques en 2023 – 2024 (jusqu’à la SÉ 24) et moyenne des cinq dernières années.

Remarque. Reproduit du Rapport épidémiologique sur la dengue de l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), Semaine épidémiologique 24, 2024 (9 au 15 juin 2024). Données saisies dans la Plateforme d’information sanitaire pour les Amériques (PLISA, OPS/OMS) par les ministères et les instituts de santé des pays et territoires de la région. Consulté le 8 juillet 2024.

Au cours de la semaine épidémiologique (SÉ) 24 de 2024 (du 9 au 15 juin 2024), 131 447 nouveaux cas suspects de dengue ont été signalés à l’OPS (Tableau 1). Le plus grand nombre de nouveaux cas a été signalé au Brésil (98 848 cas), suivi de la Colombie (9 789 cas) et du Mexique (7 392 cas).

Tableau 1. Cas de dengue signalés à l’OPS de la SÉ 24 de 2024, par pays et territoires des Amériques.

Remarque. Reproduit du Rapport épidémiologique sur la dengue de l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), Semaine épidémiologique 24, 2024 (9 – 15 juin 2024). Données saisies dans la Plateforme d’information sanitaire pour les Amériques (PLISA, OPS/OMS) par les ministères et les instituts de santé des pays et territoires de la région. Consulté le 8 juillet 2024.

* Île de Pâques (Rapa Nui)

Données cumulatives (1980 – 2024)

Le nombre de cas de dengue signalés dans la région des Amériques a, en moyenne, considérablement augmenté depuis le début des années 1980 (Figure 2). La région des Amériques a connu une propagation géographique marquée de la dengue au cours des années 1980 en raison de l’expansion et de la réintroduction de différents sérotypes de la dengue dans des pays qui n’avaient pas connu la dengue auparavant ou qui n’avaient pas connu la maladie depuis plusieurs décennies. Au cours des quatre décennies suivantes, les cas signalés à l’OPS sont passés d’environ 65 000 cas en 1980 à 3,1 millions en 2019. Bien qu’il y ait eu un léger déclin des cas pendant la pandémie de COVID-19 entre les années 2020 et 2022, les cas ont nettement augmenté pour atteindre le chiffre record de 10,1 millions de cas au 15 juin 2024.

Figure 2. Tendance des cas de dengue et des pays signalant la dengue dans la région des Amériques, 1980 à 2024.

Remarque. Figure reproduite à partir de la mise à jour épidémiologique de l’OPS du 18 juin 2024, « Augmentation des cas de dengue dans la région des Amériques ».

Sérotypes

Les quatre sérotypes de la dengue (DENV-1, DENV-2, DENV-3 et DENV-4) circulent dans la région des Amériques. Au 15 juin 2024, une co-circulation simultanée des quatre sérotypes a été signalée au Brésil, au Costa Rica, au Salvador, au Guatemala, au Honduras, au Mexique et au Panama. Pour de plus amples renseignements sur la distribution des sérotypes par pays et territoires de la région des Amériques, veuillez consulter le document OPS/OMS — Rapport épidémiologique sur la dengue, Semaine épidémiologique 24, 2024 (9 au 15 juin 2024).

États-Unis d’Amérique

Situation actuelle (données au 2 juillet 2024)

La dengue est actuellement endémique dans six territoires et États librement associés des États-Unis : Porto Rico, les Samoa américaines, les îles Vierges américaines, les États fédérés de Micronésie, la République des îles Marshall et la République des Palaos. Dans le reste des États-Unis, la transmission s’est limitée à de petites épidémies ou à des cas sporadiques, en particulier en Floride, à Hawaï et au Texas.

Du 1er janvier au 2 juillet 2024, les États-Unis ont signalé 2 391 cas de dengue dans 45 territoires, dont 1 597 ont été contractés localement et 794 ont été associés à des voyages. Sur les 1 597 cas contractés localement en 2024, la majorité a été signalée à Porto Rico (1 580 cas), suivie des îles Vierges (10 cas) et de la Floride (7 cas). En raison du nombre élevé de cas signalés à Porto Rico, les autorités de santé publique ont déclaré une urgence de santé publique pour Porto Rico en mars 2024. La répartition des cas au 2 juillet 2024 est présentée dans la Figure 3.

Figure 3. Nombre total de cas de dengue contractés localement et associés à des voyages aux États-Unis, par État et territoire, au 2 juillet 2024.

Remarque. Figure adaptée du CDC — Current Year Data (2024) — Dengue. Consulté le 8 juillet 2024.

Données cumulatives (2014 – 2024)

Au cours de la dernière décennie, l’incidence de la dengue aux États-Unis a augmenté, en moyenne, de 1 218 cas en 2014 à un pic de 3 062 cas en 2023 (Figure 4).

Figure 4. Nombre total de cas de dengue signalés aux États-Unis en fonction du statut du voyageur, 2014-2024

Remarque. Données extraites de CDC — Current Year Data (2024) – Dengue et de CDC — Historic Data (2010 — 2023) — Dengue le 9 juillet 2024.

* Inclut les données du 1er janvier au 2 juillet 2024

De janvier à juillet 2024 (SÉ 1 à 27), les États-Unis ont signalé 2 391 cas de dengue, ce qui représente une augmentation de 241 % par rapport à la même période en 2023 et une augmentation de 371 % par rapport à la même période de la moyenne des cinq dernières années (Figure 5).

Figure 5. Nombre total de cas de dengue signalés aux États-Unis en 2023 – 2024 (jusqu’à la SÉ 27) et moyenne des cinq dernières années.

Remarque. Données extraites de CDC — Current Year Data (2024) – Dengue et de CDC — Historic Data (2010 — 2023) — Dengue le 9 juillet 2024.

Canada

Au Canada, aucun cas de dengue contracté localement n’a été signalé. Tous les cas signalés au Canada ont été détectés chez des voyageurs revenant de zones où la dengue est présente.

Période d’incubation

La période d’incubation commence quatre à dix jours après l’infection et dure de deux à sept jours.

Quel est le risque actuel les Canadiens de contracter la dengue pour ?

Le risque de contracter la dengue au Canada est faible ; toutefois, tous les voyageurs sont exposés au risque de contracter la dengue s’ils se rendent dans des régions où la dengue est endémique.

Quelle est la prévalence de la dengue au Canada ?

Environ 200 à 300 cas de dengue sont importés chaque année au Canada. Tous les cas ont été détectés chez des voyageurs revenant de pays où la dengue est présente.

Quelles mesures devrait-on prendre en cas de suspicion de dengue ou de contact avec la maladie ?

L’incidence mondiale de la dengue étant en augmentation, il est recommandé aux prestataires de soins de santé de suspecter davantage la dengue chez les patients présentant une fièvre et ayant récemment voyagé en dehors du Canada dans des zones de transmission fréquente ou continue de la dengue dans les 14 jours précédant l’apparition de la maladie.

Il est recommandé aux voyageurs de consulter un professionnel de la santé si des symptômes de la dengue apparaissent lors d’un voyage ou après le retour au Canada. Un professionnel de la santé posera un diagnostic précis compte tenu des antécédents de voyage, des symptômes et des tests de laboratoire.

Définition de cas

Identification et déclaration

La dengue n’est pas une maladie à déclaration obligatoire au Canada.

Détection en laboratoire

Le Laboratoire national de microbiologie (LNM) de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) fournit quatre services de référence pour la détection de la dengue, notamment : la détection moléculaire par la réaction en chaîne de la polymérase après transcription inverse en temps réel (RT-PCR) ; la détection sérologique d’anticorps IgM et IgG dirigés contre le virus de la dengue par méthode immunoenzymatique (ELISA) ; la détection sérologique d’anticorps au moyen du test de séroneutralisation par réduction des plages (PRNT)*. Bien que ces quatre méthodes de détection requièrent toutes des échantillons de sérum, les tests moléculaires peuvent aussi être réalisés sur des échantillons de plasma ou de liquide céphalo-rachidien (LCR).

Le délai d’exécution des tests au LNM est de 21 jours civils pour la RT-PCR et de 14 jours civils pour les tests d’anticorps IgM et IgG ELISA. En ce qui concerne les tests PRNT, le délai d’exécution est de 21 jours civils après la réalisation de l’épreuve préliminaire ELISA.

Au LNM, les tests PRNT sont réalisés uniquement sur des échantillons réactifs (positifs) aux tests de détection d’anticorps IgM/IgG ELISA. Les échantillons non réactifs (négatifs) ne sont pas soumis au PRNT.

Interprétation des résultats

Des résultats positifs au test RT-PCR indiquent la présence de la dengue. Un résultat au test RT-PCR est jugé positif si l’un des quatre sérotypes cibles de la dengue est détecté par son épreuve uniplexe et si la valeur CT se situe à l’intérieur du seuil préétabli pour cette épreuve ou ce sérotype précis.

La détection d’anticorps IgG dans un test de détection d’anticorps IgG anti-dengue indique une exposition passée ou présente à la dengue. Un cas de dengue est considéré comme « confirmé » lorsqu’il y a une augmentation d’au moins quatre fois du titre d’anticorps neutralisants, ou une séroconversion dans des sérums appariés.

La détection d’anticorps IgM indique une exposition à la dengue à une période indéterminée. Toutefois, il est important de noter que la seule détection d’IgM ne suffit pas pour confirmer une infection aiguë, car les anticorps IgM peuvent rester dans le sérum pendant un an ou plus après l’exposition au virus.